La carrière artistique unique du poète syrien Adonis et sa perspective farouchement indépendante sur le monde ont captivé le monde arabe pendant des décennies; cependant, il reste principalement inconnu dans le monde anglophone. Cela pourrait changer avec la traduction de Khaled Mattawa des poèmes sélectionnés d'Adonis, qui a reçu le prix Saif Ghobash-Banipal pour la traduction.
Adonis est largement considéré comme l'un des plus grands poètes de la dernière moitié du siècle. Ses œuvres ont été traduites et publiées largement et il est reconnu à travers le Moyen-Orient comme une icône littéraire dans le monde arabe. Il est également un iconoclaste qui, au cours de sa longue carrière, n'a pas eu peur de suivre son propre chemin au sens littéraire et politique, défendant farouchement ses propres opinions, parfois controversées. Né Ali Ahmad Said Asbar en 1930 à Al Qassabin, Lattaquié, dans le nord de la Syrie, Adonis a développé son art littéraire tout en vivant au Liban, où il a fondé Poetry Magazine pour publier des travaux expérimentaux, et à Paris, où il a étudié au début des années 1960 et plus tard émigré. Dans sa poésie, il aborde le nationalisme, à la fois syrien et panarabe, et la tradition arabe du soufisme. Il a également introduit pour la première fois des éléments du modernisme et du surréalisme européens dans la poésie arabe. Adonis a suggéré dans le soufisme et le surréalisme, que ces mouvements apparemment disparates sont en fait très similaires, et que les deux partagent une croyance en la nécessité de se livrer à la sous-conscience dans une recherche de sens absolu. Ce faisant, il libère ces mouvements de leurs fondements nationaux et révèle la manière dont les cadres philosophiques orientaux et occidentaux ne doivent pas être considérés comme hostiles.
L'introduction par Adonis des concepts et des conventions littéraires européennes au vers arabe a rencontré beaucoup de résistance dans le passé, tout comme sa séquence expérimentale persistante, qui a vu son travail qualifié d'ésotérique et impénétrable. Cependant, ses attaques contre la culture et la poésie arabes contemporaines ont suscité beaucoup plus de controverse au Moyen-Orient. Adonis a accusé la culture arabe de `` paralysie '' et a fameusement suggéré dans le New York Times en 2002 qu '`` il n'y a plus de culture dans le monde arabe, c'est fini, culturellement parlant, nous faisons partie de la culture occidentale, mais seulement en tant que consommateurs, pas en tant que créateurs. Malgré cette critique acharnée, Adonis continue de produire des œuvres principalement en arabe plutôt qu'en français ou en anglais et son public fait clairement partie du monde arabe qu'il critique.
Cette ambivalence s'est manifestée dans la réponse du poète à la crise qui a plongé la Syrie depuis le début du printemps arabe au début de 2011. Il a été critiqué pour sa réponse à l'escalade de la violence qui a englouti la Syrie, certains suggérant qu'il a pas assez fait pour dénoncer le régime d'Assad. Adonis a répondu en déclarant qu'il était en opposition directe avec le régime depuis plus de cinquante ans et que son soutien au mouvement de protestation syrien était total, déclarant seulement qu'il préférerait des méthodes de protestation non violentes.
Le refus obstiné d'Adonis de se plier aux pressions de l'opinion populaire, à la fois dans le monde arabe et en Occident, signifie qu'il ne sera jamais considéré comme la figure de proue de tout mouvement. Cependant, ce refus de faire des compromis est au cœur de sa poésie, et c'est la raison pour laquelle ses œuvres stimulantes continuent de gagner un tel public.
Adonis a été célébré dans A Tribute to Adonis au London's Mosaic Rooms en 2012. L'exposition a présenté plus de 100 peintures d'Adonis ainsi qu'un éventail d'événements littéraires.
Par Thomas Storey
